Côte d’Ivoire : Analyse de la filière cacao avant l’ouverture de la campagne principale du 1 octobre 2024 (Par GP-PDCI)

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En Mars 2024, les cours du cacao sur le marché international, ont atteint des sommets historiques. A New York, ce prix a dépassé le seuil des 10.000 dollars la tonne, soit un peu plus de 6 050 FCFA/kg, un niveau jamais atteint auparavant. Au début du mois d’avril 2024, le prix du cacao sur le même marché international était négocié à 6.300 FCfa le Kg, un record inégalé.

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A cette période, alors que le Groupe Parlementaire du PDCI-RDA demandait un prix bord-champ de 3 500 à 4000F/kg pour la campagne intermédiaire (Avril à Septembre 2024), et ce sur la base de la promesse du Gouvernement Ivoirien de toujours payer au moins 60% du prix international au producteur, il n’a été consenti qu’une modeste augmentation du prix bord-champ de 1000F à 1 500F/kg. 

L’explication donnée par le Gouvernement Ivoirien à l’époque était qu’avec le système de vente anticipée à la moyenne, adopté par notre pays, qui viserait à stabiliser le prix d’achat par campagne, afin de protéger le producteur ivoirien contre les fluctuations brutales des cours, le prix bord-champ du cacao est fixé d’avance sur la campagne et qu’il était difficile de faire mieux. Il avait même été argumenté que le Gouvernement se donnait ainsi une marge de manÅ“uvre pour une autre augmentation du prix bord-champ à la campagne principale qui commence en Octobre 2024.

Le PDCI-RDA avait alors indiqué qu’il laissait le Gouvernement Ivoirien seul juge de ses chiffres sur le résultat des ventes par anticipation de la récolte pour la période d’avril à septembre 2024, qui donneraient un prix CAF moyen de 2 326 FCFA le kilogramme, sur la base duquel il fixait le prix bord-champ de la campagne intermédiaire à 1 500F /kg. 

Lorsqu’on observe les prix internationaux relativement élevés qui ont persisté depuis Mars jusqu’à début septembre 2024, les paysans sont donc en droit d’attendre une hausse significative de leur prix bord-champ.

Il y a quelques jours, l’Organisation internationale du Cacao (ICCO) a rendu publiques, ses estimations pour la campagne 2023/2024. Elles indiquent que le marché mondial du cacao devrait connaître son troisième déficit consécutif de 439 000 tonnes. Elle a donc revu à la hausse, ses estimations sur le déficit mondial en fèves pour 2023/2024 à 462 000 tonnes, soit 5,2 % de plus que les précédentes prévisions.

Cette annonce intervient dans un contexte où la production mondiale de cacao devrait chuter de 14,2 % à 4,3 millions de tonnes en raison de la faiblesse de l’offre en Afrique de l’Ouest, principale source d’approvisionnement de cacao dans le monde. Selon les prévisions de l’ICCO, la Côte d’Ivoire, premier producteur mondial de la fève, devrait récolter finalement 1,74 million de tonnes pour la campagne 2023/2024 alors qu’au Ghana, l’offre est attendue à 450 000 tonnes. Plutôt modestes et préoccupantes comme performances!

Il est important de noter que globalement, les cours du cacao restent encore supérieurs à la moyenne de l’année 2023 en raison des contraintes d’approvisionnement persistantes. Le prix du contrat à terme pour livraison en septembre a ainsi clôturé à 9 666 $ sur l’Intercontinental Exchange (ICE) le 30 août dernier restant proche de la barre des 10 000 $ qui a déjà été dépassée 6 fois en avril dernier et une fois en juin 2024. Par comparaison, en 2023, la moyenne des prix était de 4 196 $. A Londres, les prix ont clôturé à 5 541 livres la tonne, le 30 août dernier contre une valeur moyenne de 3 506 livres enregistrée en 2023.

Cinq facteurs principaux sont à la base de cette chute de la production mondiale : 

  1. Les conditions météorologiques défavorables ;
  2. Le vieillissement du verger cacaoyer ;
  3. L’orpaillage clandestin qui favorise la raréfaction de terres disponibles pour la cacaoculture;
  4. L’épuisement des sols et ;
  5. La pression parasitaire marquée par les dégâts des ravageurs et des maladies tels que le Swollen Shoot. 

Ce sont essentiellement les mêmes facteurs qui ont causé la hausse des cours vers des niveaux historiques en mars dernier. Quatre de ces variables sont structurelles (vieillissement du verger, orpaillage clandestin, épuisement des sols et pression parasitaire). Ils ne devraient donc pas changer du jour au lendemain. Seul le climat peut varier inopinément d’une année à l’autre. Cela laisse penser que, ceterisparibus, les prix relativement élevés observés ces derniers mois devraient s’inscrire dans la durée.

Au-delà de la modeste hausse du prix bord-champ consentie par le Gouvernement, c’est la problématique du système de commercialisation des matières premières agricoles dans notre pays, qui est posée avec acuité.  Il ne s’agit pas d’opposer le système de vente stabilisé au système de vente libéralisé. Ces deux mécanismes ne sont pas les seules options qui existent dans le domaine de la commercialisation du cacao. Les opposer pour justifier le choix du Gouvernement du système stabilisé, n’est pas une position convaincante et tenable. Il n’y a qu’à se souvenir du sort des fonds de stabilisation lorsqu’il a fallu y faire appel durant les périodes de fortes baisses des prix internationaux, pour soutenir des prix bord-champ décents aux producteurs. 

Par ailleurs et d’une manière générale, c’est la question de la clé de répartition des revenus du cacao et des autres produits agricoles entre le Gouvernement et les acteurs des filières respectives (café, cacao, hévéa, palmier à huile, coton anacarde, etc.), qui doit être analysée en profondeur. Les producteurs de ces matières premières sont les parents (très) pauvres de l’agriculture nationale et le Gouvernement gagnerait à s’y pencher urgemment. C’est un impératif de justice sociale et d’équité.

Le Groupe Parlementaire PDCI-RDA renouvelle sa demande au Gouvernement d’engager une réflexion approfondie avec les partenaires concernés, sur les systèmes de commercialisation des produits agricoles. Pour être efficace, aucun système de commercialisation ne doit rester figé dans son application. Tout système est dynamique et rien ne s’oppose à des réflexions en vue d’une révision ou tout au moins une modulation des politiques de prix agricoles en Côte d’Ivoire, afin de refléter plus équitablement les fluctuations des prix mondiaux sur le prix au producteur ivoirien. A terme, une révision de la politique de commercialisation des produits agricoles ivoiriens s’impose.

Enfin, le Gouvernement devrait également revoir sa politique de prélèvements obligatoires faits aux producteurs de matières premières agricoles. Les planteurs de café, cacao, hévéa, palmier à huile, anacarde, coton, etc., ne doivent pas subir la double taxation qui leur est imposée actuellement, avec, d’un côté les impôts sur chaque kilogramme de produit, et de l’autre, les nombreux prélèvements qui leur sont infligés. En cette période de rentrée scolaire et de cherté du coût de la vie, ils doivent plutôt être protégés et encouragés.

Au regard de ce qui précède, le Groupe Parlementaire PDCI-RDA propose que, pour la campagne principale de cacao qui s’ouvre le 1er Octobre 2024 prochain, le prix bord-champ garanti, soit fixé à un minimum de 3 500 FCFA par kg.

Pour le Groupe Parlementaire PDCI-RDA

A l’Assemblée nationale

Le président Doho Simon.


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